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12 mars 2021

Joseph Kabila avec Colette Braeckman « J’étais avec les Rwandais et lorsque j’ai vu comment ils se comportaient avec les réfugié

Il ya cela 20 ans depuis que le quotidien Le Potentiel (N° 2165 du samedi 10 mars 2001) avait publié cet article.

Colette Braeckman : Monsieur le président, on commence à vous connaitre sur la scène internationale. Mais humainement, vous demeurez un inconnu. Je me souviens cependant vous avoir vu de loin à Kisangani, en 1997…

Kabila Junior : C’est vrai, j’étais là lorsque la ville est tombée aux mains de l’Afdl (Alliance des forces pour la démocratie et la libération du Congo, qui visait à verser Mobutu). J’étais avec les Rwandais et lorsque j’ai vu comment ils se comportaient avec les réfugiés hutus, j’ai pensé qu’un jour nous aurions la guerre avec ces gens-là. Mais à l’époque, il était impossible de parler de cela et par la suite, tout a été fait pour bloquer l’enquête de l’Onu, par Bizima Karaha entre autres, qui était alors ministre des Affaires étrangères. Aujourd’hui, bien sûr, si l’Onu voulait encore enquêter sur cette affaire, elle serait la bienvenue. Depuis lors, dans la région, il y a eu bien d’autres victimes, congolaises celles-là. Une ONG américaine a estimé que 2.500.000 civils congolais avaient péri au cours de la guerre actuelle. Un chiffre aussi massif n’est pas le fait du hasard : il y a bien eu intention de tuer la population. Cela aussi, c’est un génocide, contre les Congolais cette fois, mais nul ne s’en émeut. Il est vrai que dans les forêts de l’Est, il n’y a pas les caméras de Cnn… on a parlé des massacres de Kasika, de Makobola, de shabunda plus récemment, mais qui s’y intéresse ? Lorsque les Maï Maï révèlent ces atrocités, on répond qu’il s’agit de la propagande des extrémistes hutus… Expliquez-moi comment la communauté internationale peut considérer que tout le peuple congolais est devenu interhamwe (les miliciens hutus, Ndlr).

Et comme le note bien notre consœur dans l’entretien téléphonique, c’est à se demander si Kabila Junior a jugé sincèrement les implications diplomatiques de sa réponse. Et même au-delà. Car, non seulement cela peut affecter les rapports entre Kigali et Kinshasa qui sont au dégel, mais également et désormais, le chef de l’Etat congolais est un témoin de premier plan dans l’affaire des massacres des hutu au Congo, une affaire qui sera, au terme, du point 9.1.a de l’annexe A de l’accord de cessez-le-feu de Lukasa, versée au tribunal international. Cela a aussi des répercussions sur l’image même du chef de l’Etat sur le plan international, surtout en matière des droits de l’homme.

Cette phrase de trop du chef de l’Etat est une preuve, si besoin en était encore, qu’il n’est pas entouré du tout. Comment ses conseillers, dans une interview qui n’est pas en direct, n’ont pas réalisé que cette phrase peut être assassine, même si d’autre part cela apparait comme une façon de demander aux Rwandais de quels Hutus ils parlent encore.

Ci-dessous de larges extraits de l’entretien téléphonique entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella retranscrits par Moïse Musangana

 L’entretien téléphonique entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella

Voa : Avez-vous été surprise par ces propos ?

Colette Braeckman : Je savais qu’il avait été témoin. Je lui ai posé la question en lui disant : Je me rappelle que vous avez été à Kisangani cette année-là. J’étais surprise par la précision de sa réponse. L’information, elle-même, on l’avait déjà parce que son père avait dit la même chose. La différence est que son père n’était pas sur le terrain. Il était à Goma ou Bukavu, tandis que le fils était intégré dans l’armée, dans les troupes de libération qui avançaient à travers le Congo. Donc, il est aussi un témoin de premier plan.

Voa : L’on sait aussi qu’il est proche du colonel James Kabarehebe qui, à l’époque – vous l’avez relaté dans votre livre sur le conflit congolais – dirigeait les opérations de l’armée rwandais à Kisangani.

Colette Braeckman : Il était tout jeune. Il devait avoir 25 ou 26 ans. (…). Kabila père avait confié son fils au commandant James pour avoir une formation militaire. Donc, ils étaient ensemble. Et Joseph Kabila me dit qu’avant, il avait été aussi en Ouganda. Il connaissait très bien l’armée ougandais (…).

Voa : Est-ce que vous avez le sentiment, Colette, que Joseph Kabila serait prêt à collaborer éventuellement avec une reprise éventuelle de cette enquête sur cette affaire ? On sait bien que le rapporteur spécial de l’Onu Robert Garreton est attendu à Kinshasa dans les prochains jours.

Colette Braeckman : Je ne sais pas s’il est prêt à témoigner personnellement. Ça, je ne lui ai pas posé la question (…). Il a indiqué très clairement qu’aujourd’hui la commission d’enquête est la bienvenue à Kinshasa. Si elle veut reprendre ses investigations, elle aura toute la latitude de Kinshasa pour continuer à travailler. Autrement dit, M. Garreton est le bienvenu.

Voa : Comment vous interprétez le fait que cette affaire refasse surface aujourd’hui, à un moment où il y a dégel entre Kinshasa et Kisangani ? Est-ce que tout cela ne va pas à nouveau empoisonnée le climat ?

Colette Braeckman : Je pense que le président Kabila n’a pas sincèrement jaugé les implications diplomatiques lorsque je lui ai posé la question : était-il à Kisangani à ce moment-là ? Il a simplement confirmé. Je ne crois pas qu’au moment où il a répondu, il a pensé à ce que tout cela pouvait entraîner sur le plan diplomatique (…). On verra bien.

 L’interview accordée à notre consœur belge Colette Braeckman par le général-major joseph Kabila et parue dans le journal « Le Soir » du 7 mars 2001 fait l’objet des commentaires en sens divers dans les salons, et particulièrement dans les milieux politiques, à Kinshasa. Avec raison, bien entendu. Dans la mesure où c’est la toute première fois que le jeune président s’ouvre à l’opinion, par la presse interposée, après sa prestation de serment et son discours d’investiture.

Cet entretien aura permis, une fois de plus, à l’opinion singulièrement nationale, de se faire une idée de ce que le président pense de l’ouverture politique tant attendue, du Dialogue inter-congolais et de l’enquête en cours sur l’assassinat de son père. Sans oublié le rôle que doit jouer la jeunesse dans l’édification du pays.

Pour ce qui est de la mise en place de la nouvelle équipe gouvernementale, celle-ci n’est pas liée à la fin de l’enquête sur la mort du feu Laurent-Désiré Kabila, un ministre pouvant toujours être invité à témoigner si c’est nécessaire. Le chef de l’Etat se serait donné un temps d’observation, surtout pour les ministres hérités de son père, afin d’apprécier les capacités d’un chacun.

S’agissent de la libéralisation des partis politiques dont l’abrogation du décret 194 portant organisation et fonctionnement politiques en RDC constituerait un signal fort, le chef de l’Etat n’aurait pas encore une opinion exacte. « Il est trop tôt pour donner une réponse directe, complète, dit-il. Mais un peu comme son père et prédécesseur, il note « Jadis, il y avait ici 450 partis politiques, et je ne veux que cela se reproduise. Par ailleurs, pour moi, les partis doivent avoir un caractère national, et non ethnique ou régional ». Faisant savoir que le pays est en partie sous occupation, Kabila junior relève que ce n’est pas seulement le gouvernement qui doit libéraliser, les partis politiques n’étant pas libres de se constituer sous les cieux rebelles.

Quant au Dialogue inter-congolais, à l’instar de son prédécesseur, il souligne : « A mes yeux, le dialogue, cela ne doit pas être une table ronde où on se partage le gâteau. Ce qui compte, c’est de voir comment on va donner au peuple congolais le pouvoir de décider ; comment préparer les élections, qui doivent évidemment avoir lieu sur l’ensemble du pays ».

Parlant de la commission d’enquête chargée de faire la lumière sur l’assassinat de son père, Kabila Junior veut savoir la vérité totale sur tous ce qui s’est passé. Ainsi, cette commission ne doit de travailler, d’interroger tout le monde e d’aller jusqu’au bout de ses investigations. Et s’agissant des jeunes générations dont il parait comme le porte-parole, le chef de l’Etat répond qu’il ne s’agit pas uniquement d’une question de génération. « Certes, dit-il les jeunes doivent apporter leur contribution, mais l’expérience compte aussi ». Et d’ajouter : « Je dois prendre le temps d’évaluer la situation ».

Mais c’est au sujet des Hutus assassinés au Congo lors de la guerre dite de libération menée en son temps par l’Alliance des forces démocratiques du Congo que Kabila Junior a prononcé une phrase de trop, phrase ayant des implications sur les plans tant des droits de l’homme, judiciaire que diplomatique ainsi que cela transparaît dans l’entretien téléphonique ci-dessous entre Colette Braeckman et Ferdinand Ferella sur la « Voix de l’Amérique » jeudi 8 mars dans la matinée. A la base, la question suivante de la journaliste belge au président congolais.

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