Kuyu., Camille, 2020.Félix Tshisekedi.Un leadership vertueux pour un nouveau Congo, Paris, les éditions Espérance

Camille Kuyu, auteur de cet ouvrage consacré au Président Félix Tshisekedi est docteur et habilité à diriger des recherches en droit.Il est professeur des universités et enseigne depuis plusde troisdécennies dans plusieurs universités et grandes écoles en Europe et en Afrique centrale et de l’Ouest. Il est consultant international, éditeur scientifique et aussi dirigeant d’entreprise et d’associations. Ses travaux actuels portent sur l’éthique, le dialogue interreligieux pour la paix et le développement durable.Ce compte rendu présente dans unpremier temps le contenu de l’ouvrage et dans un deuxième temps quelques réflexions que suscitent les idées  exprimées dans  ce livre   dans la perspective de la construction d’un Congo nouveau à la lumière du leadership vertueux.

1. Du contenu.

Ce nouvel ouvrage de Camille Kuyu intituléFélix Tshisekedi. Un leadership vertueux pour un Congo nouveau estpréfacé par Alain Juillet,Président de l’académie d’intelligence économique. Celui-ci écrit dans sa préface :« Ce livre très documenté nous permet de découvrir et de comprendre un président qui est totalement inscrit dans le 21° siècle et veut redonner à son pays sa grandeur passée. C’est un défi ambitieux d’une extrême complexité qui le différencie de tous les autres chefs d’Etat.Il a été visiblement réfléchi depuis longtemps pour s’inscrire dans le champ du possible en s’appuyant sur des valeurs et des principes qui ont fait la preuve de leur efficacité dans l’histoire du pays.Dans un environnement extérieur difficile,toute la difficulté va résider dans ce dosage entre la modernité et la tradition mais on peut penser que sa culture chrétienne y contribuera grandement en lui permettant de trouver le juste équilibre.Il lui restera à lefaire évoluer au fil du temps et de la réussite de son plan d’action. »(Alain Juillet, p16)

Quatre syntagmesclés caractérisent le contenu de ce livre : Félix Tshisekedi,Leadership vertueux et pour un nouveau Congo.

1.1.   Félix Tshisekedi

Félix Tshisekediest né le 13 juin 1963 à Léopoldville,fils d’Etienne Tshisekediwa Mulumba et de Marthe Kasalu.Il a fait ses études primaires et une partie de son cursus secondaire dans sa ville natale.Exilé ensuite en Belgique, il acheva ses humanités à l’Athénée Royale,à Bruxelles.Il y poursuit ensuite une formation supérieure en marketing et communication à l’Institut des carrières commerciales.Sa vie politique commence très tôt. Jeune étudiant en Belgique, il intégra l’Union pour la démocratie et le Progrès social (UDPS), le parti de son père. Après son retour au Congo, il est élu député à Mbujimayi en novembre 2011.Il sera nommé secrétaire généraladjoint de l’UDPS en octobre 2016 et élu à la présidence de ce parti fin mars 2018,après le décès de son père. Candidat de son parti pour l’élection présidentielle, Félix Tshisekedi est proclamé vainqueur et investi Président de la République démocratique du Congo en janvier 2019.

 Par ailleurs,l’ouvrage est centré sur la question de leadership politique.il présente Félix Tshisekedi comme un président qui a fait le choix d’un autre chemin,celui des vertus,pour relever les différents défis précités.il montre aussi que ce nouveau chemin emprunté par le nouveau président congolais ne pourra réellement faire la différence que si la classe dirigeante et l’ensemble de la population lui emboitent le pas.C’est à cette condition que l’émergence d’un nouveau Congo sera possible.Il met en exergue la nécessité de l’articulation entre les vertus individuelles et la morale publique.Cette articulation culmine dans le combat pour la démocratie, la dignité humaine et la paix et dans la lutte contre la corruption,l’impunité et les inégalités de genre. Toutes ces questions sont analysées en relation avec les discours et les messages du Président qui constituent la source principale d’inspiration de l’auteur de ce livre dont le contenu se configure en quatre parties caractérisant le leadership vertueux de Félix Tshisekedi : Ethique et dignité humaine,antivaleurs et corruption,des inégalités de genre,leadership vertueux et (re)construction de l’Etat.

Camille Kuyu, l’auteur du livre, analyse les défis éthiques, économiques, politiques et sociaux auxquels fait face la République démocratique du Congo depuis plusieurs décennies et s’efforce non seulement de repérer des pistes de réponses ouvertes par le Président Félix Tshisekedi dans ses discours et messages, mais aussi d’apporter des réflexions et propositions complémentaires et utiles.

1.2 Les défis à relever en priorité

1.2.1. Ethique et dignité humaine

Du point de vue de l’éthique,la dignité et les droits de la personne impliquent « l’obligation pour autrui de la traiter avec respect,c’est-à-dire de ne lui faire aucun mal,de ne pas en abuser,d’être juste,de ne lui imposer des modèles du bien et du bonheur dont elle ne veut pas,de ne pas la traiter comme un simple moyen et de ne pas considérer que ses intérêts et son bien-être sont subordonnés à l’intérêt et au bien-être d’autres, au seul intérêt de la science et de la société »(UNESCO,Cours de base de bioéthique ,Paris,2008,p.23).Par-là,l’auteur veut montrer que le respect de la dignité humaine n’est possible que dans le cadre d’un régime démocratique et que la République démocratique du Congo a encore de nombreux défis à relever dans ce domaine notamment dans le domaine des droits économiques et sociaux généralement occultés  par rapport aux droits civils et politiques.En effet, sur le plan social et économique,la pauvreté demeure une préoccupation majeure en République démocratique du Congo. La pauvreté s’accompagne des inégalités et des exclusions.

Félix Tshisekedi s’est engagé dès son arrivée à remettre l’éthique au centre de la vie politique et à redonner aux Congolais leur dignité perdue. Aussi, pour répondre aux besoins urgents de la population et soulager sa souffrance, le Président Félix Tshisekedi a décidé de rendre effective la gratuité de l’enseignement élémentaire prévue dans la constitution et s’est engagé à mettre en place la couverture maladie universelle, l’accès à l’eau potable, l’accès à l’électricité.

La République démocratique du Congo était réputée pour des violations des droits civils et politiques.Dans son discours d’investiture, Félix Tshisekedi affirme vouloir construire un Etat de droit respectueux des droits humains et des libertés fondamentales.Par ailleurs,  Dans la foulée, il posera des gestes Mais, la lutte pour la dignité humaine suppose l’instauration d’un régime démocratique,seul capable d’offrir aux individus le bonheur auquel ils aspirent.Pour accéder à ces valeurs,il faut se référer à l’éthique qui cherche à définir des principes pour l’orientation de l’existence humaine.L’évaluation démocratique des Etats devrait passer par la mise à l’épreuve de leur sérieux éthique (respect des droits et libertés des citoyens,la transparence dans les modalités financières,lutte contre les antivaleurs et la corruption). Dans ses discours le Président Félix Tshisekedi utilise plusieurs expressions pour parler de l’expérience démocratique congolaise : transition démocratique,engagement démocratique,processus démocratique et avancée démocratique.La République démocratique du Congo a encore de nombreux défis à relever dans le domaine de la démocratie,même si des avancées significatives ont été enregistrées depuis les dernières élections.

1.2.2.Les antivaleurs et lacorruption

Le Président Félix Tshisekedi a fait de la lutte contre la corruption et l’impunité une priorité.La lutte contre la corruptionnécessite plusieurs actions.

-A court terme, il est nécessaire de réprimer les actes délictueux individuels et démanteler l’organisation ou les réseaux descriminels de tous genres par des enquêtes et la poursuite des suspects.La question de l’impunité est également préoccupante. Le Président FélixTshisekedi a décidé de mettre en œuvre sa vision d’un Etat de droit où la justice sera indépendante, où l’impunité sera bannie et où le système judiciaire sera consolidé.

-A moyen terme

La République démocratique du Congo devra se doter d’une loi anticorruption car la corruption est non seulement une atteinte à l’éthique mais elle est aussi un facteur de déstabilisation politique et d’appauvrissement.Au-delà de l’existence d’une loi anticorruption, ilfaut que les textes juridiques soientappliqués pour un changement des mentalités par une éducation à la citoyenneté fondée sur la culture des vertus.

-A long terme

La prévention et la sensibilisation des populations aux effets néfastes de la corruption devraient être  privilégiées par la prise des mesures concrètes pour prévenir la corruption par la cartographie des risques et la mise en œuvre d’un dispositif d’alerte interne et de protection des lanceurs d’alerte .Pour cela ,le Président Félix Tshisekedi  a créé  deux structures spécialisées  rattachée à la Présidence : la coordination pour le changement des mentalités et  l’Agence de prévention et de lutte contre la corruption.

1.2.3. Les inégalités de genre

Il s’agit des inégalités dans la représentativité politique et des violences basées sur le genre.

--Des inégalités dans la représentativité politique

Dans son discours d’investiture, le Président FélixTshisekedi évoque la nécessité d’une politique de promotion de l’égalité entre les sexes pour faire de la lutte contre les inégalités de genre une priorité.

-Inégalités et violence basées sur le genre

Le problème des inégalités et de violence basée sur le genre se pose avec beaucoup d’acuité dans le pays. De milliers de victimes ont subi des dommages matériels et moraux considérables à la suite deterribles violences.Ces personnes ont droit à réparation et l’Etat a le devoir d’assurer cette réparation.Il faut aussi déconstruire l’imaginaire et les mythes véhiculés par les textes bibliques et la chansonpopulaire.

1.2.4. Leadership vertueux et la(re)construction de l’Etat par le Président Félix Tshisekedi.

La place de l’éthique, des vertus,et des valeurs morales dans la vision politique de Félix Tshisekedi constitue le point d’aboutissement de cet ouvrage. L’auteur estime que c’est le leadership vertueux qui permettra au Président de la République démocratique du Congo de rebâtir un pays plus attractif,plus fort et plus grand au cœur de l’Afrique. L’union entre les vertus individuelles et la vision politique est la clé des transformations sociales et politiques souhaitées par tous.Le leadership de Félix Tshisekedi pourrait se résumer en ces quelques motsclés tirés de ces discours :

Pour l’auteur de ce livre,l’impact des vertus sur la gouvernance politique,économique et sociale   est très manifeste. Félix Tshisekedi a les atouts nécessaires pour être  : il est un homme de foiqui a choisi le chemin des vertus pour construire un Etat de droit et démocratique au cœur de l’Afrique et lui rendre sa grandeur perdue.

 II. Quel regard porté sur toutes ces considérations pourla concrétisation de ce leadership vertueux pour un nouveau Congo ?

C’est le propre de la vie des hommes aux destinées lumineuses d’apprendre à l’humanité à mieux faire naître des ordres nouveaux,incitant ainsi au goût de vivre et à cet élan vers les hauteurs.Le Président Félix Tshisekedi a sûrement  un idéal à transmettre à tous les congolais en général et à toute  la jeunesse en particulier,idéal fondé par son désir ardent d’affranchir les congolais de la dure servitude qui les enchaîne pour les entraîner vers la délivrance comme l’aurore qui descend sur les montagnes,comme la rosée bienfaisante venant en aide au soleil resplendissant pour faire mûrir les fruits précieux dont on attend la maturité :la reconstruction du pays démoli pendant de dures périodes de convulsions. Le pays doit survivre et il faut le sauver dans l’union et non dans la division.C’est le grand défi à relever par le leadership d’un homme qui laisse à ses jugements leur développement propre,silencieux,laissant chaque impression,chaque germe de sentiments mûrir en soi,dans l’inexprimable et croissant comme l’arbre qui ne presse pas sa sève et qui résiste confiant aux grands vents sans craindre les incertitudes de l’avenir.Le leadership vertueux n’est-ce pas celui qui est guidé par l’esprit de communion dont la récompense est dans cet apaisement, dans cette sérénité où le temps que dure la lutte,il s’offre à son peuplequi doit sentir fondre et s’évanouir les différences qui séparent.Son action ne doit-il pas se fonder sur la conviction profonde que le Congo est à la recherche d’une harmonie morale qui sera faite de justice et de paix ? «Avec l’amour, on a le pardon ». Le leadership vertueux suppose un changement profond dans l’ordre socialetmoral dans la ligne de ce que dit Victor Hugo « Sur une vaste faute,il faut un vaste oubli » oubliant qu’on ne peut engager un leadership vertueux avec« un lit de rose » laissant libre cours aux épines,ce tendon d’Achille, surgissant de manière inattendue comme des masses de pièges sur sa voie ?

Le leadership vertueux ne devrait-il pas reposer sur la démocratisation qui vise le respect de la liberté et de l’égalité des citoyens ? En pays démocratique,la souveraineté appartient à tous les citoyens.Et, « pour que tout marche,il faut que chacun apporte son effort » (Daniel Rops). Dans ce contexte, la lutte devrait être axée sur la création d’un Etat de droit avec comme mission la protection des intérêts nationaux pour la défense de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale pour une véritable (re)construction nationale dans le but de rattraper le retard dans lequel se trouve le payset pour le bien-être de la population contrainte à la dépossession et au dénuement. Le leadership vertueux susceptible d’insuffler un nouvel esprit dans la société congolaise doit insister sur les trois mystiques :

-La mystique du travailbien fait.Pour libérer la société congolaise de la pauvreté, la famine,l’oppression et le désespoir, il faut prendre l’initiative de semeur du travail.L’aide des autres, si utile qu’elle puisse paraître,ne suffit pas pour extirper ces maux qui accablentle peuple.Le leadership vertueux devra réaliser que les grandes nations du monde sont passées par le travail assidu.L’on ne devrait donc pas se réfugier dans les veinesexcuses comme le manque d’instruments de travail adaptés,l’on doit tirer au maximum profit du minimum d’infrastructures disponibles pour réaliser les merveilles.  « Labor omnia vincit improbus » (Le travail acharné vient à bout de tout), écrivait Virgile dans son livre « De Agricola ».

-La mystique du culte de la vérité et de la probité. De plus en plus,de nos jours, l’on se soucie moins de cette mystique.En effet, on triche,on fraude,on promet sans tenir parole.On évite la vérité au nom de l’intérêt prétendument supérieur.Et pourtant, « l’impératif de la probité,a écrit Jean Rostand, n’est pas conditionnel mais il est catégorique ». Et pourtant comme l’a écrit Elie Ngoma Binda Phambu « Un intellectuel dévoué,nationaliste,aimant son peuple, choisît nécessairement de parler,et non de se réfugier dans le silence (…),il choisit de dire au pouvoir décideur les chemins qui mènent au développement de tous »( cité par Camille Kuyu,p.23).Aucun raisonnement,aucune argumentation subtile,aucune dialectique ingénieuse ne saurait nous faire admettre qu’on doit transiger sur le vrai.La mystique de la vérité doit posséder celui qui a pour mission de révolutionner le monde et la société.

-La mystique de la culture d’une attitude mentale positive.La pensée humaine,en effet,est matière vivante et créatrice.Une attitude mentale positive,telle qu’une conviction intime et vraie,se concrétise toujours.Le tenant du leadership vertueux doit savoir que lorsqu’il imprime, avecforce dans son subconscient, une idée,une pensée,celle-ci trouve son expression dans la réalité concrète.Il devra donc s’efforcer à imprégner son subconscient de convictions qui, si elles sont fermes, et inébranlables, se réaliseront. Il faut donc bannir de son chemin, les pensées négatives que sont la peur,l’incertitude,les complexes d’infériorité,la jalousie,la haine,la condamnation de soi et l’hostilité. Les pensées négatives sont généralement considérées comme les vraies et seules causes de l’insuccès dans la mesure où elles suscitent l’apparition d’émotions et de sentiments négatifs donnant naissance à toutes sortes de troubles,d’échecs et de limitations.  « L’homme,disaient les anciens,ne devient que ce qu’il imagine et sent. »

Pour conclure

Il est vrai que la vie de la population congolaise n’a pas toujours été de toute harmonie.Elle a connu des années de joie et de tourmente. Mais armée de ces trois mystiques,la populationcongolaise en appui au leadership vertueux devra   croire fermement avec Walter Rathenau que « Même l’époque accablée est digne de respect,car elle est l’œuvre non des hommes, mais de l’humanité,donc de la nature créatrice, qui peut être dure, mais n’est jamais absurde. »Si les époquesvécues dansle pays ont été dures, le peuple a ledevoir de les aimer,de les pénétrer de son amour jusqu’à ce qu’il ait eu à déplacer les lourdes masses de matière dissimulant la lumière.Tous les congolais devraient avoir cet idéal à l’esprit pour la construction d’un Congo nouveau en toute harmonie.

Julien Kilanga

Professeur émérite des universités

Recteur honoraire de l’université de Lubumbashi

Directeur honoraire de la langue française et de la diversité linguistique à l’Organisation internationale de la Francophonie